Déclaration du Dr. Bachar Ja’fari, Représentant permanent de la Syrie auprès de l’ONU, lors du Conseil de sécurité consacré à la situation au Moyen-Orient et à la question palestinienne, le 22 janvier 2019.
Je vous remercie, Monsieur le Président.
Pour commencer, je tiens à féliciter votre pays [la République dominicaine] pour son accession au statut de membre non permanent du Conseil de sécurité, et je vous félicite personnellement pour votre rôle de Président des travaux de ce Conseil pour ce mois-ci. Je salue la ministre des Affaires étrangères de l’Indonésie, Mme Marsudi, et je félicite la Palestine, l’Etat de Palestine, pour sa présidence du G77 + Chine.
Monsieur le Président,
Hier, les forces d’occupation israéliennes ont encore une fois commis une série d’agressions par des frappes de missiles contre les territoires de la République Arabe Syrienne, menées depuis les cieux libanais (cela a été mentionné en détail par ma collègue, la représentante du Liban). Elles nous ont attaqués depuis les cieux libanais, depuis les territoires palestiniens occupés et depuis le Lac de Tibériade sur le Golan syrien occupé. Ce fut une violation flagrante du droit international, de la Charte des Nations Unies et des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité de l’ONU, ainsi que de l’accord de Désengagement de 1974 (conclu entre Israël et la Syrie).
Ces actes d’agression n’auraient pas été commis si le Conseil de sécurité n’avait pas failli à son devoir d’imposer la mise en œuvre des résolutions du Conseil de sécurité ayant trait au conflit israélo-arabe depuis de longues décennies, et sans le soutien illimité fourni par certains membres permanents du Conseil de sécurité à cet entité-voyou. Cela a encouragé Israël à augmenter ses crimes fréquents, ses violations et son terrorisme d’État, n’ayant jamais aucun compte à rendre, même de manière purement formelle. Cela a été démontré par les actes d’agression répétés contre mon pays perpétrés par Israël, et le soutien aux multiples facettes qu’Israël a fourni pendant des années à des organisations terroristes.
Ces actes n’ont jamais été condamnés, et il n’y a eu aucun appel du Conseil de Sécurité à y mettre fin, du fait de la position des États-Unis, de la Grande-Bretagne et de la France, qui sont complices et partisans d’Israël à de tels actes d’agression. Les politiques de ces 3 pays et leurs positions à l’ONU violent de manière flagrante, tant dans la lettre que dans l’esprit, la responsabilité qu’ils sont censés avoir dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales, conformément à la loi internationale et aux dispositions de la Charte des Nations Unies. Le fait que ces pays continuent de jouer le rôle de témoins parjures et empêchent le Conseil de Sécurité d’entreprendre ses responsabilités ne nous empêchera pas d’exercer notre droit de légitime défense et d’œuvrer à reprendre le Golan syrien occupé par tous les moyens possibles.
Monsieur le Président,
La récupération du Golan syrien est un droit établi pour la République arabe syrienne. Ce droit imprescriptible ne saurait faire l’objet de négociations, de concessions ou d’expiration. Le retrait total des forces d’occupation israéliennes du Golan jusqu’à la ligne du 4 juin 1967 est une obligation qui doit être honorée. C’est une exigence inébranlable et inconditionnelle basée sur les principes du droit international et les résolutions internationales contraignantes de l’ONU, y compris vos propres résolutions 242, 338 et 497.
Israël cherche fébrilement à modifier cette réalité, comme nous l’avons vu aujourd’hui dans l’intervention du représentant israélien : il a parlé de tout, sauf de la cause palestinienne et du conflit israélo-arabe (qui constituaient l’ordre du jour). Israël cherche fébrilement à modifier cette réalité, et continue à proférer des déclarations agressives et à entreprendre des actes criminels, mais ceux-ci sont voués à l’échec, et ne conduiront jamais sous quelque forme que ce soit à la moindre altération des droits légaux ou souverains de mon pays.
Certains pays ont investi massivement dans la guerre terroriste menée contre mon pays, et ont compté sur la situation de certains pays de la région pour éclipser les droits arabes et étouffer les voix appelant à mettre en œuvre les résolutions internationales contraignantes des Nations Unies qui imposent la fin de l’occupation israélienne des terres arabes. De plus, ces pays ont tenté d’obtenir des gains pour l’occupation et ont promu un accord suspect visant à liquider la cause palestinienne et les droits établis et inébranlable des peuples et des pays de la région. Ils se sont efforcés de déclencher des tensions artificielles et de fomenter des conflits surréalistes entre les pays de la région, afin de dévier leur attention de la cause fondamentale de tout ce qui se passe au Moyen-Orient. Tout ce manque de stabilité, de prospérité et de développement n’a d’autre cause que la poursuite de l’occupation israélienne, de la colonisation israélienne, et le massacre israélien de la cause palestinienne.
Monsieur le Président,
La période récente a été témoin de nombreuses pratiques israéliennes dangereuses et systématiques, par lesquelles les forces occupantes ont tenté de consolider leur contrôle et d’imposer leur volonté sur le Golan syrien occupé. Citons par exemple : la tenue de réunions du gouvernement israélien dans le Golan syrien occupé; la tentative d’y organiser des élections locales illégitimes; la signature d’accords et la délivrance de permis de piller les ressources naturelles du Golan; tout récemment, le pillage des propriétés de Syriens et leur déplacement pour établir un projet de production d’énergie éolienne sur environ 6000 dunams de terres dans certains des sites environnants les villes de Magd al-Chams, Aïn Qania, Buqata et Massada; et l’activité de colonisation continue, ainsi que les crimes et la répression quotidienne contre les citoyens syriens sous le joug de l’occupation. Ils les arrêtent et les jettent dans les prisons israéliennes arbitrairement, comme cela est encore le cas de l’activiste Sedqi al-Maqet, le Nelson Mandela de la Syrie, et d’Amal Abu Saleh. Ils ont également soumis d’autres Syriens à des assignations à résidence.
Les responsables israéliens ont également fait des déclarations agressives répétées, qui soulignent que la puissance occupante ne se soucie ni du droit international ni des résolutions de votre Conseil, et a l’intention de poursuivre son occupation.
Malheureusement, toutes ces questions et leur rejet par notre peuple dans le Golan n’ont pas retenu l’attention du Coordonnateur spécial, M. Mladinov, afin qu’elles puissent être incluses dans l’exposé mensuel qu’il vous fait. Pire encore, il a délibérément évité d’appeler les choses par leur nom. Il nous a parlé du côté « Alpha » et du côté « Bravo », comme si chacun d’entre vous savait ce que désignent Alpha et Bravo, au lieu d’émettre une condamnation claire de l’agression israélienne presque quotidienne contre les territoires de la République Arabe Syrienne, y compris l’agression continue contre l’aéroport international civil de Damas [1]. Je le répète, un aéroport civil. Un mépris si flagrant constitue un échec politique et moral de remplir son mandat, et va à l’encontre des principes et des règles applicables à l’ONU, le privant ainsi de toute légitimité.
Monsieur le Président, n’est-il pas grand temps pour le Conseil de prendre les mesures nécessaires pour faire cesser les agressions israéliennes répétées contre les territoires de mon pays ? Ou devrions-nous attirer l’attention des va-t-en-guerre de ce Conseil en exerçant notre droit légitime à l’autodéfense, et répondre à l’agression israélienne contre l’aéroport international civil de Damas par des frappes sur l’aéroport de Tel-Aviv ?
Monsieur le Président,
Nous sommes pragmatiques et nous connaissons les divergences des positions politiques des membres de ce Conseil. Cependant, nous vous demandons de vous concentrer sur le terrain commun qui nous unit, à savoir le droit international, la Charte des Nations Unies et les résolutions de votre Conseil. Nous insistons donc sur la nécessité pour les pays qui soutiennent Israël, ses politiques et ses positions de revoir leur approche, de se tenir à ce terrain commun que j’ai évoqué, et d’œuvrer à la restauration des droits légitimes à leurs véritables propriétaires, conformément aux résolutions internationales contraignantes de l’ONU et des organismes internationalement reconnues.
Dans le cas contraire, le destin de cette organisation internationale ne sera qu’une répétition de l’échec de la Société des Nations pour les mêmes raisons. Souvenons-nous que la plupart des calamités subies par notre pays ont été causées par la violation du droit international et de la Charte des Nations Unies, par la constitution de coalitions illégitimes comme celles qui ont ciblé l’Irak, la Libye, le Yémen, la Syrie et d’autres, et en raison de la convocation de réunions qui contournent le Conseil de sécurité, comme cette réunion de Varsovie [appelée par les Etats-Unis contre l’Iran], ou la Coalition stratégique au Moyen-Orient, connue des experts du renseignement comme l’OTAN du Moyen-Orient. Toutes ces coalitions sont faites en dehors du Conseil de sécurité des Nations Unies.
Cela pose la question : d’où ces coalitions et réunions tirent-elles leur légitimité ? Les relations internationales sont-elles régies par le droit international et la Charte des Nations Unies sur laquelle les pères fondateurs se sont efforcés de s’entendre ? Ou sont-elles régies par la volonté et l’ordre du jour destructeurs de certains pays ? N’avons-nous pas raison, Monsieur le Président, d’avertir que cette organisation pourrait finir comme la Société des Nations si nous ne prenons pas position contre les politiques de ces pays ? L’absence d’un parrainage des Nations Unies pour la réunion de Varsovie montre clairement qu’une telle approche ne parviendra pas à résoudre quoi que ce soit, et ne réalisera pas ce qui a été annoncé par les organisateurs eux-mêmes, à savoir l’élaboration d’une stratégie commune sur le Moyen-Orient. Ils ont dit eux-mêmes que la réunion de Varsovie vise à élaborer une stratégie commune sur le Moyen-Orient.
Monsieur le Président,
Mon pays exprime sa position ferme et fondée sur des principes soutenant les droits du peuple palestinien à l’autodétermination et à un État indépendant sur tous ses territoires, avec Al-Quds (Jérusalem) comme capitale, et le droit au retour des réfugiés, conformément à la résolution 194 de 1948. Nous répétons et soulignons que toute mesure qui porterait préjudice à ces droits sera nulle, non avenue et rejetée, et ne fera qu’exacerber les tensions et menacer la paix et la sécurité dans la région et dans le monde.
Pour conclure, Monsieur le Président, je déclare à ceux qui tentent de redessiner les cartes de notre région selon leurs caprices que notre peuple, qui s’est élevé contre la guerre terroriste internationale sans précédent qui nous est imposée, se lèvera également contre ces plans diaboliques, et parviendra à les contrecarrer, tout comme il a déjoué les autres au fil des décennies.
Je vous remercie, Monsieur le Président.
[1] Voici les termes utilisés par Nikolaï Mladenov, Coordonnateur spécial des Nations Unies pour le processus de paix au Moyen-Orient, pour informer le Conseil de sécurité de l’agression israélienne au début de cette session du Conseil de Sécurité :
« Sur le Golan occupé, le cessez-le-feu entre Israël et la Syrie a été maintenu avec un calme relatif et une activité militaire relativement faible dans les zones de séparation et de limitation du côté Bravo. La FNUOD attribue cette activité à des explosions contrôlées d’explosifs dans le cadre du déminage effectué par les forces de sécurité syriennes. Le calme relatif régnant dans la zone d’opérations de la FNUOD a été interrompu par les événements survenus le 25 décembre et plus récemment les 20 et 21 janvier.
Le 25 décembre, la FNUOD a aperçu un hélicoptère du côté Alpha qui a tiré quatre roquettes qui se sont abattues sur le côté Bravo. Ce jour-là, la FNUOD a également entendu et observé des missiles sol-air, des canons de défense anti-aérienne, des roquettes et des mitrailleuses lourdes tirées du côté de Bravo, mais elle n’a pas pu observer les points d’origine ou d’impact.
Les 20 et 21 janvier, la FNUOD a constaté une augmentation de l’activité aérienne sur les zones de séparation et de limitation du côté Bravo, ainsi que des tirs de missiles. La FNUOD a pris contact avec les deux parties pour désamorcer la situation. Les observations d’activités militaires coïncidaient avec les informations de sources libres selon lesquelles Israël aurait confirmé avoir mené une série de frappes aériennes sur des cibles en Syrie en réponse à un missile tiré de la Syrie intercepté par Israël.